Notcimik, la forêt d’où je viens
Me réapproprier ma naturalité dans les forêts du Nord
« Le Nord est la nature sauvage au-delà de la frontière agraire interrompue et des îles urbaines du milieu du Canada. Le Nord ne se trouve pas le long d’une ligne. C’est un espace profond, une terre de lacs, de rivières, de ruisseaux, de marécages, de rochers et d’animaux sauvages, une terre d’une beauté toujours menacée d’extinction. »
— Bruce W. Hodgins
Dans le projet Notcimik, le Nord est défini dans son sens le plus large. Plutôt que de le restreindre à une zone géographique précise comme l’Arctique, les Territoires du Nord-Ouest ou le Yukon, le Nord devient une entité mouvante, aussi bien territoriale que culturelle. Le « Nord historique » se déplace progressivement vers le sud, à mesure que l’on plonge dans le passé. En suivant son déplacement à travers le temps et l’espace, nous découvrons un territoire qui se transforme à chaque époque.
Lorsque les commerçants de fourrures de la Compagnie du Nord-Ouest s’aventuraient au-delà des rapides de Lachine, le pays d’en haut — le Nord — commençait juste au-delà de Montréal.
Aujourd’hui, le Nord se divise en trois zones : le petit Nord, le Moyen Nord et le Grand Nord. Le premier s’étend sur les contreforts du Bouclier canadien, le deuxième couvre les hauteurs des terres jusqu’à la limite des arbres, et le troisième commence là où la taïga laisse place à la toundra et aux steppes arctiques.
Mais le Nord est aussi, et peut-être surtout, un état d’esprit. Se fondre dans la nature, c’est se connecter à un organisme vivant. Je deviens le territoire dont je fais partie. En préservant son intégrité, nous contribuons à sa préservation, et donc à la nôtre. Depuis mon retour du Grand Nord, j’ai amorcé un projet pour raconter et célébrer les forêts, le territoire, ses poésies, son histoire, ses habitants et les enjeux qui s’y rattachent.
Notcimik, qui signifie « la forêt d’où je viens » ou « là d’où vient mon sang » en Atikamekw, me permet de me reconnecter à ces espaces naturels où l’humain a laissé peu de traces, des lieux où les infrastructures sont rares. Ce projet exige curiosité, autonomie, un sens de l’aventure, ainsi qu’un mélange de savoir-faire anciens et modernes. Mon objectif est de mettre en valeur le patrimoine naturel et historique, en croisant réflexions, récits et reportages narratifs, tout en racontant ma relation intime avec la nature.
Il est important de préciser que, bien que je m’inspire des concepts et des mots issus des langues autochtones, je ne suis pas membre des Premières Nations et ne prétends pas parler en leur nom. Je ne me considère pas non plus comme un aventurier au sens moderne du terme, mais plutôt comme un vagabond animé par une passion pour les grands espaces naturels et préservés.
D’origine européenne, je suis porteur d’une culture façonnée par le métissage. Ma langue est le français des Canadiens-Anciens, une appellation qui désignait pendant près de 300 ans les habitants francophones du Canada, à une époque où les anglophones se définissaient encore comme Britanniques, et ce, jusqu’à il y a à peine 150 ans. Mes ancêtres, arrivés en Amérique au XVIIe siècle, se sont mêlés, par le sang et la culture, aux sociétés autochtones. Ces immigrants ont engendré les coureurs des bois, les voyageurs de la traite des fourrures, et certains ont contribué à fonder la nation métisse.
Tout au long de ma vie, j’ai eu la chance de côtoyer les Atikamekw du Nitaskinan, dans les régions de Lanaudière et de la Haute-Mauricie, les Anishinaabe du Témiscamingue et du nord-est de l’Ontario, ainsi que les Nunavimmiuts du Nunavik. Je compte des amis parmi ces nations, ainsi que chez les Innus du Nitassinan. Mon regard et ma culture n’ont cessé d’évoluer au fil des rencontres. Les mots que j’emploie sont un hommage à cet héritage : celui de mes ancêtres, de mes lectures, de mes nuits passées à la belle étoile, et des moments partagés avec les Premières Nations et les Inuits.
Concept du projet
« Chez moi » est un concept difficile à définir. Les Atikamekw ont un mot, Notcimik, qui signifie « la forêt d’où je viens » ou «là d'où vient mon sang». Ce projet, Notcimik, raconte et célèbre les forêts du Nord, le territoire, sa poésie, son histoire, ses habitants, et les enjeux qui y sont liés.
Adoptant un mode de vie quasi nomade, j’ai aujourd’hui un pied-à-terre à Joliette, dans Lanaudière. Mais en vérité, mon « chez moi », c’est Notcimik.
Le projet documentaire et narratif se décline en deux volets principaux : deux environnements, deux façons de partir en territoire, d’habiter et de communier avec Notcimik et de le raconter par des récits, des reportages, des galeries photo ainsi que par des illustrations. Un troisième lieu, le «Lac à la Cache», complète cette vision comme milieu de vie en forêt en reliant ces volets, tels un sanctuaire et une porte d’accès à ces espaces.
1- Kushpu, le voyage traditionnel en territoire
Kushpu représente un mode de vie nomade et immersif dans la nature, où les déplacements se font lentement, à faible impact, en canot, raquettes ou à pied sur les anciennes routes d’eau et portages (Nastawgan) et où les campements se font sous la sous la tente et la nourriture se cuit sur le feu. Il ne s’agit pas d’exploits sportifs, mais d’une communion avec le territoire, en retrouvant la simplicité et la lenteur d’une vie en forêt. Ce voyage traditionnel est une manière de se fondre dans la nature et de renouer avec un rythme ancestral, où l’humain appartient à la terre plutôt que de la dominer. Comme le dit la poète innue Joséphine Bacon, « c’est réapprendre à avoir le cœur lent ».
Suivez ce lien pour en savoir plus
2 - Mishtuku Shuap | Écho de la cabane en bois
Mishtuku Shuap est une immersion hivernale dans une cabane en bois rond rustique, nichée au cœur de Notcimik lorsque je ne suis pas en déplacement traditionnel. C’est un refuge où le rythme des journées est marqué par le crépitement du poêle à bois et le silence profond de l’hiver, seulement brisé par les sons de la forêt. Chaque sortie devient une lecture des traces laissées dans la neige, révélant les histoires du territoire et de ses habitants. Cette expérience offre un retour à la simplicité, à l’observation minutieuse et à l’écoute attentive des murmures de la nature.
Suivez ce lien pour en savoir plus.
Le lac à la cache
Le lac à la Cache occupe une place particulière dans l’univers de Notcimit. Ce camp forestier hors réseau, niché au bord d’un lac immaculé, agit comme un sanctuaire où simplicité et convivialité se rencontrent. Plus confortable que la cabane en bois rond, il est un lieu de ressourcement, propice à la contemplation, à l’écriture ou encore à la peinture et au dessin. C’est aussi un espace chaleureux où il fait bon accueillir parents et amis, partageant des repas cuisinés sur le feu et des moments d’échange autour de la nature.
Le «Lac à la Cache» n’est pas seulement un refuge : il est une porte ouverte sur le territoire. Plutôt qu’être une immersion en territoire impliquant une forme d’engagement comme les deux autres, il est un refuge permettant de vivre dans la nature et de préparer les voyages en territoire. Depuis ce camp de base, il est possible de partir explorer les anciens sentiers (Nastawgan), ces routes d’eau et de portage qui relient les volets de Notcimit : Kushpu, le voyage traditionnel en territoire, et Mishtuku Shuap, l’écho de la cabane en bois.
Pour en savoir plus sur la genèse et l’essence de cet endroit unique qui me permet d'intégrer le projet documentaire Notcimik et boucler la boucle, je vous invite à découvrir mon article dédié en suivant ce lien pour en savoir plus.
Conclusion
Mon pied-à-terre dans la petite ville n’est qu’un temps d’arrêt pour faire du lavage, archiver mes écrits, mes photos et illustrations, voir mes proches ou travailler sur des projets nécessitant un lien avec le monde domestiqué. Mais c’est une pause temporaire, un point de transit.
Mon vrai chez moi, c’est le monde des êtres naturels et des esprits de la forêt. Mon chez moi, c’est Notcimik.
~~~~~
Vous avez apprécié cet article?
Si vous aimez lire mes textes, regarder mes photos ou visionner mes vidéos sur ma chaine YouTube, merci de considérer m'offrir un café de temps en temps afin de supporter mon travail et montrer votre marque d'appréciation pour un contenu avec le maximum de qualité.
Ce lien vous permet d'accéder à un espace où vous pouvez facilement faire un don de 3$ en toute sécurité, soit l’équivalent de m'offrir un café, et laisser un message. Vous n'avez même pas besoin de créer un compte !
Ce lien vous permet également d'accéder à un espace de discussion, d'échanges et d'interactions avec moi en laissant un commentaire sous la publication «Autour du feu de camp avec M-A Pauzé».
Merci et au plaisir!