Poussières d'étoiles

Cette journée du 8 avril était radieuse et sans nuages. Elle venait clore une fin de semaine de retrouvailles avec un bon ami de mes années au Collège militaire royal de St-jean, qui nous a généreusement accueillis chez lui avec sa conjointe. Rassemblés sur la terrasse, nous avons attendu le spectacle en écoutant Vincent nous réciter et expliquer toutes les phases à venir. À peine Joanie et Rosalie venaient d’arriver que la lune commença à cacher le soleil. Puis, les ombres projetées ont montré un rebord diffus du côté de la lune alors que le rebord restait net du côté du croissant solaire. Vénus est apparue, scintillante. Lorsque la lune cacha entièrement le soleil, la noirceur crépusculaire tomba tout d’un coup. Les oiseaux se sont tus et un engoulevent d’Amérique — une espèce en péril que l’on entend habituellement au crépuscule — se mit à chanter. Nous avons soudainement ressenti la perte de chaleur radiante émanant du soleil. La couronne solaire s’illumina et nous avons vu à l’œil nu une projection de plasma solaire. La photo que j’ai prise en montre même plusieurs. Que ça passe vite, 3 minutes, 28 secondes lorsqu’on vit tant de choses avec émerveillement. Une grande vague d’émotions nous envahie. Nous venions de vivre un moment unique dans notre vie. Bon, Rosalie aurait peut-être la chance d’en vivre une autre au Québec le 3 mai 2106.

Les rebords du côté du soleil éclipsé (à gauche) sont plus diffus. Le soleil se donne en spectacle. Une photo composée de deux expositions (le 1/4 supérieur exposé pour voir l'éclipse et les 3/4 inférieurs exposé pour voir l'environnement). La couronne solaire ainsi que quelques protubérances, ces projections de plasma pouvant atteindre 25 fois le diamètre de la Terre.

Mais ce n’était pas fini. Marc Buonomo, un ami, ancien professeur d’astronomie à l’université de Grenoble, conférencier, grand voyageur et chasseur de phénomènes astraux est venu nous retrouver pour souper. Les discussions continuèrent d’animer la tablée jusqu’à ce que le serveur du restaurant vienne nous rappeler que des clients faisaient la ligne dehors pour avoir leur tour. Qu’à cela ne tienne, nous avons continué sur le trottoir alors que, cette fois, le crépuscule s’installait pour de bon. 

Quand on pense que la vie exige des conditions physico-biochimiques précises, que cette vie permette l’évolution d’êtres conscients capables de s’émerveiller, que les conditions pour voir une éclipse comme celle que l’on a vue exigent que ces êtres conscients soient sur une planète située à la distance parfaite pour qu’un astre passant entre elle et le soleil occulte ce dernier en permettant quand même de voir la couronne solaire, c'est là que l'on réalise que nous avons assisté à un événement d’une ampleur inimaginable et que la mécanique engendrant tout ça nous dépasse. C’est là aussi que l’on comprend que le terme Anichinaabe « Kitche Manitou », que les Européens ont traduit à tort par grand esprit, est en fait Grand Mystère.

Une éclipse solaire totale est beaucoup plus qu’un phénomène astral. C’est une occasion de vivre en communauté une connexion avec la nature et de se rappeler humblement que l’univers ne tourne pas autour du nombril des humains. Comme le disait Hubert Reeves - et Carl Sagan avant lui - nous ne sommes que des poussières d'étoiles!

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Ce récit s’inscrit dans une approche d’écrivain-reporter visuel, alliant rigueur journalistique, écriture immersive et photographie documentaire. Chaque image, chaque texte, est né d’une expérience vécue, où j’étais non seulement témoin, mais aussi partie prenante de l’histoire.

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